Les créateurs confrontés à l’intelligence artificielle
C’est un début de journée hivernal ordinaire pour Boulet. Tenant une tasse de café, l’illustrateur de bandes dessinées s’installe devant son ordinateur et se connecte aux médias sociaux. Cependant, il est accueilli par un flux inhabituel de notifications ce jour-là : la surprise, la colère, l’indignation et la tristesse s’emparent de l’auteur de « Notes et Rogatons ».
Midjourney fait partie, avec Stable Diffusion et DALL-E, des programmes d’intelligence artificielle (IA) générative les plus populaires. Ces outils permettent aux utilisateurs de créer une image en fournissant simplement une instruction écrite. Pour fonctionner, ces systèmes sont « formés » sur d’énormes recueils d’images, principalement recueillies sur Internet et soumises au droit d’auteur.
Les développeurs de ces outils gardent secrètes les données d’entraînement utilisées. Cela rend impossible pour un artiste de savoir si ses œuvres ont été utilisées, et de réclamer une compensation légitime. De plus, ces IA menacent l’avenir des métiers artistiques. C’est une appropriation du travail de millions d’artistes sans partage équitable de la valeur créée.
De nombreuses actions en justice ont été lancées contre ces logiciels d’IA. En janvier 2023, trois illustratrices américaines, Sarah Andersen, Kelly McKernan et Karla Ortiz, ont entamé une action de groupe contre Midjourney, Stability AI et DeviantArt, qui commercialisent des programmes basés sur Stable Diffusion. À la fin de 2023, ils ont révélé une liste de 4 700 noms, démontrant que les œuvres de ces créateurs ont été utilisées pour alimenter le programme.
OpenAI, à l’origine du générateur de texte ChatGPT, fait également l’objet de poursuites de la part d’un collectif d’écrivains, incluant l’auteur de Game of Thrones, George R. R. Martin, et par le New York Times.
Les créateurs se mobilisent pour faire valoir leurs droits contre ces programmes d’intelligence artificielle qui menacent leurs professions et leur droit à une rémunération équitable. Ils visent à faire progresser la législation sur la protection des droits d’auteur dans le domaine de l’IA.
Source : www.lemonde.fr